Immergés, d’ Alexandra Pieteraerents

Parmi les bons romans, Il y a ceux qui font longuement réfléchir et il y a ceux qui émeuvent longtemps.

Immergés fait partie de la deuxième catégorie, il laisse une empreinte sur le cœur.

Le résumé

Henri est professeur de français, Franck un junkie, Eva et Samantha se démènent entre le harcèlement scolaire et la pression familiale, et Axelle se retrouve au milieu d’histoires glauques totalement éloignées de son univers. Tous ces personnages évoluent dans différentes sphères ; pourtant, ils sont tous étrangement liés. L’auteure signe là son premier roman, dans lequel le lecteur se retrouve immergé dans les rues de Rouen, au cœur d’un drame énigmatique.

Ce que j’en dis …

J’ai d’abord, bien entendu, été touché par la sobriété de la couverture.

Autant les illustrations de qualité me sont un régal pour les yeux, autant j’aime à me satisfaire d’une couverture minimaliste. Le nom de l’auteure, le titre du livre, l’éditeur, la collection. C’est tout pour le contenant, c’est le contenu qui compte. Je vois dans cette économie de moyens un double témoignage de confiance : confiance envers l’auteure – son texte est bon, pas besoin d’en rajouter, et confiance envers le lecteur – il est une personne consciente et intelligente, la quatrième de couverture lui suffira à se décider.

Et la confiance est bien placée, puisqu’effectivement le texte est bon et que le lecteur va rapidement s’approprier le livre, l’histoire, les personnages et leurs péripéties.

Le monde est petit

C’est ce qu’on dit lorsque deux personnes qui n’ont à priori rien en commun se découvrent subitement liées par le truchement d’une troisième, d’un lieu, d’une occupation ou d’une passion commune. Et ces étrangers qui ne le sont plus commencent à interagir, à se découvrir, à se connaître.

C’est l’axe de progression de ce récit très vivant. Le lecteur y découvre des personnages fondamentalement différents les uns des autres, bien campés dans le roman, à tel point qu’il est difficile de déterminer quel est le personnage principal, le héros. Et ce n’est pas un problème parce qu’ici il n’y a pas de héros.

Henri, Franck, Axelle, Eva, Samantha et les autres sont tous authentiques dans leur banalité, dans la médiocrité de leur existence normale et c’est dit sans condescendance. C’est une vérité exposée crûment : nous voilà tels que nous sommes, et le lecteur ne peut pas échapper à l’inclusion. Même si l’histoire qui va se dérouler n’est pas banale en elle-même, les protagonistes nous sont tellement proches dans leur faiblesse et leur immaturité qu’à moins d’être un surhomme, une surfemme, (bien que cela déplaise à mon correcteur d’orthographe), on ne peut que s’identifier.

Et partant de là, on a le sentiment d’être au plus prêt de l’angoissante dévastation des personnages, on ne peut que ressentir une réelle impression de gâchis en voyant ces gens devenir au fil des pages une version de plus en plus désavantagée d’eux-mêmes.

Immergés est un roman noir, indéniablement.

Et comme pour le café, les amateurs apprécient dans la littérature quand le noir est bien noir.

Rouen est encore plus petit

Je n’ai jamais mis les pieds à Rouen, je ne juge donc pas cette ville. Mais le procédé littéraire employé par Alexandra Pieteraerents qui consiste à limiter les épisodes de l’histoire à ce contexte géographique précis accentue encore davantage cette proximité avec le lecteur. ( Je pense que pour le lecteur rouennais, il doit y avoir un certain vertige à lire ce livre).

Ceci dit, si comme moi vous n’êtes pas Normand, il n’empêche qu’ Immergés, à défaut de vous faire passer un moment agréable dans la capitale de cette belle région, vous permettra de découvrir une auteure qui signe là un premier roman tout à fait réussi.

Immergés, d’Alexandra Pieteraerents est édité par Racine & Icare

Le livre broché de 220 pages est vendu 13€.

Il est paru le 15 avril 2022.

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